Gábor Kalina, un artiste qui a un rêve grand comme un chêne

Gábor Kalina, un artiste qui a un rêve grand comme un chêne

Le métier de tonnelier est peu connu, pourtant incontournable dans l’univers viti-vinicole car il a un impact direct sur les nuances aromatiques du vin.

Gábor Kalina est né dans une famille de tonneliers à Tállya. Son grand-père était tonnelier, et lui-même a hérité du savoir-faire de son père. Gábor a repris l’entreprise familiale en 1998, il y a maintenant 25 ans. Aujourd’hui l’entreprise Kalina compte huit collaborateurs et produit mille tonneaux par an. Comme le précise Gábor, son entreprise aurait la capacité de produire douze fois plus de tonneaux par an, mais ce n’est pas sa priorité.

"Le plus important, c’est de faire vivre un métier de passion, qui s’exerce toujours à la main."

Gábor travaille uniquement les vieux chênes des montagnes de Zemplén au cœur de la région de Tokaj, qui ont tous entre 120 et 270 ans. Tout comme il y a une sélection dans les vignobles, il y a aussi une sélection dans les forêts. Le chêne hongrois jouit d’une excellente réputation, pourtant certains viticulteurs hongrois préfèrent utiliser, pour des questions de prestige, les fûts en chêne français. Pourtant, testées en laboratoire, la composition du chêne hongrois et celle du chêne français sont très similaires.

Le bois de chêne est riche en acide tannique, qui donne un goût amer et est donc indésirable pour la vinification. Les douelles (lattes de bois) sont empilées sur plusieurs mètres de haut et soumises aux intempéries de la nature. La pluie et la neige tombent dessus, le vent les dessèche. Elles restent à l’air libre pendant trois à cinq ans, en attendant d’être transformées en tonneaux. Plus on laisse sécher le bois, et plus il se débarrasse de ce goût de tannin et prend un doux arôme d’abricot et de vanille qu’il transmettra au vin lors de la vinification.

Photos: Gábor Kalina

Les douelles, composantes principales de la barrique, sont ensuite alignées à l’aide d’une table de montage. La fabrication débute alors sous les nombreux coups de marteau de Gábor, qui, ajustant les douelles une par une, forme ainsi sa barrique à l’aide de cercles de montage.

Pour finaliser le cintrage des douelles, c’est la chauffe, l’opération probablement la plus importante, qui permet de les ramollir. La surface intérieure du tonneau, avec laquelle le vin entrera en contact, est passée lors de cette étape au feu, afin que la chaleur attendrisse la fibre du chêne. Quand la fibre est assez chaude − 270 à 300 °C −, on peut fermer le tonneau complètement. Le feu et l’eau sont deux éléments qui donnent sa forme finale au précieux contenant, mettant en valeur la qualité du chêne minutieusement sélectionné. C’est ici que le savoir-faire et l’art du tonnelier prennent tout leur sens.

Gábor espère transmettre ce beau métier aux futures générations.

En France ce métier est très bien encadré. On compte aujourd'hui 130 entreprises répertoriées et plusieurs écoles de tonnellerie enseignent les gestes du métier dans le cadre d’une formation en alternance en Charente, Gironde, Dijon, et Corrèze. Actuellement une soixantaine d’apprentis sont inscrits au CAP Tonnellerie*.

Malgré sa beauté et sa haute technicité, le métier de tonnelier est un savoir-faire qui disparaît avec le temps en Hongrie. Actuellement il n’existe aucune formation certifiante pour devenir artisan tonnelier en Hongrie.

Dans ce contexte peu rassurant pour l’avenir des tonneliers hongrois, Gábor ne baisse pas les bras. Il souhaite ouvrir les portes de son entreprise à tous ceux qui souhaitent se former à ces gestes hautement techniques et apprendre ce savoir-faire unique. Il n’exclut pas une possible collaboration avec les entreprises françaises.

« J’espère que nous pourrons bientôt enseigner le métier de tonnelier ici à Tállya, pas seulement aux Hongrois, mais aussi aux étrangers qui sont intéressés par cet artisanat unique et indispensable pour les vignerons », déclare Gábor Kalina.

*Source: CMA France

Cet article a été publié dans Le Boristic Post le mois d'avril 2023. Abonnez-vous à notre newsletter pour recevoir nos articles en exclusivité.

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